Où l’on voit une robe tourbillonnante (presque) tirer sa révérence…

La robe de mémoire 15

 

A propos de cette robe (mosaïque du dessus: le dos de la robe), il y aurait encore à dire, beaucoup de détails à photographier, mais je me souviens de ces mots d’un homme aimé, éminemment courtois comme on l’était autrefois; il disait en se levant, à la fin d’une soirée: « il n’est meilleure compagnie qui ne se quitte»; c’était le signal du départ des invités.

Ce monsieur était un peu roi, puisque mari de la «reine des dahlias», mon papa prend sa place dans cette histoire de femmes.

Il faudrait avant d’aborder une autre séquence parler de l’écrin de rangement de la robe (une boite réalisée en pagne, car ma famille avait un lien avec l’Algérie dont nous avons parlé, mais aussi le Cameroun qui vit naître l’Artis-Anne, le Sénégal,)……….Cette boite est inspirée de Nicole Boisseau (patchwork-boutis, Idées cadeaux 4, un livre excellent bien copié par certains auteurs récents qui ne la citent pas.); dedans, il y a aussi une aumonière que j’ai réalisée dans un taffetas ivoire comme celui dela robe, à l’intérieur de ce petit sac, un carnet recouvert de soie et rapporté d’Inde (voir en bas de la mosaïque des détails); j’ai noté sur ses pages certaines petites idées à propos de mon travail, des citations…. Enfin, j’ai cousu dans un drap ancien une housse de cintre décorée à l’ancienne pour présenter la robe (milieu de mosaïque des détails). En ce moment, chez une couturière de ma ville, la vitrine est décorée de ma collection de machines à coudre – enfant (j’en ai une trentaine, vous en avez quelques unes en photo dans Création 2009) la robe en taffetas, fera ensuite la Une de ce décor; peut- être encore suscitera-t-elle la curiosité des passants, et surtout de vieilles dames qui furent des jeunes filles qui révèrent de posséder de telles corolles tournoyantes et soyeuses. Rappelez-vous: c’est toujours bien mieux en vrai qu’en photo !

En bas des volants de dentelle (grands bouts des combinaisons maternelles), au fil, j’ai écrit ceci qui ne cesse de résonner en moi: et je l’ai constaté chez beaucoup d’entre vous: « Chaque souvenir textile retient une histoire, lorsqu’on l’effleure, doucement, se fait entendre le murmure des voix qu’on croyait éteintes ».

 La robe tire sa révérence; il y aura des prolongements (jusqu’à l’article 18, tout de même!) -dûs aux dahlias et à vous!-ces jours prochains et  cela fait, je vous retrouverai un peu plus tard- si vous voulez bien me suivre,  avec quelques corbeilles colorées et un joyeux bazar hétéroclite, …..  j’éventerai un peu des secrets de fabrication de ma « vannerie textile »  que je suis seule ou presque à pratiquer en France, suivra  un récit d’ L, d’ailes, d’elles………….Nous serons un peu fées ! 
 
  Enfin, je vous remercie, vous avez été très nombreuses à enrichir ce dialogue, jamais je n’ai eu l’impression de monologuer, mais celle, au contraire, de parler des femmes, de la Femme, de vous, mes sœurs. Vous m’avez tenu la main, et enrichie de vos commentaires. Je suis comblée par cet échange! Et je remercie celles qui sont venues, mais n’ont rien écrit. C’est mon petit doigt qui me l’a dit!
  
 
  
 C’est avec ces mots qu’aujourd’hui nous nous quittons:«  (http://oceandefleurs.canalblog.com/)

« Tout nous est prêté, nous devons le faire fructifier, lenjoliver puis le transmettre! Ce nest jamais un « abandon » : cest un passage de relais

Voila le devant...

 

 

A comme Amélie, Amour…et même Alger

la robe mémorielle 14

Comme il se trouve qu’aux 4 premières générations de filles dont nous tirons le fil, il y a eu chaque fois une soeur, il y a eu aussi beaucoup de A!Plusieurs prénoms commencent par cette lettre: ceux  d’Amélie, la grand-mère (et d’une de ses petites filles), l’artis-Anne, d‘Aurélie,  d’Anaïs et  de sa filleule: Alix, ma petite fille…………..Le hasard…Mais le A est celui d’amour, ce n’en est donc pas tout à fait  un!

J’ai utilisé le dernier monogramme qui me restait, celui d’un des draps de ma grand-mère Amélie qui l’avait brodé elle-même à la lueur d’une lampe à pétrole, le soir, car le jour, dans un village pyrénéen déserté des hommes et de son mari, pour cause de guerre, elle était institutrice .

Ce A, c’est aussi celui d’Alger, écrit sur la robe parmi d’autres noms de lieux, autant de pierres blanches qui jalonnent notre chemin familial; Alger où sont enterrés certains  membres de ma famille dont la jeune femme pour qui fut faite la robe, ma tante……………. Vous n’aurez pas des photos de chaque détail (vous seriez lassés- si vous ne l’êtes déjà!) cependant, une photo du bracelet pour Alger, ville  nichée dans le coeur maternel:  Alger est représenté par un bracelet de piécettes écrites en arabe, il est ancien, en argent, mais si je l’ai porté, je ne le fais plus. Vous en devinerez les raisons.

bracelet et séquence nostalgie

Le A n’était guère visible, brodé blanc sur blanc, très en relief cependant, je l’ai recouvert de quelques points lacés et colorés.

Ma maman posait chaque jour devant les photos de la sienne et de sa soeur, une fleur de son beau jardin, moi, ,j’ai cousu, brodé et appliqué quelques dahlias aux alentours du monogramme. Il est dit que pour moi, c’est un peu la fleur du souvenir; quand j’en vois un, le coeur serré, je le tends vers le ciel où une jardinière compose des bouquets.

Croyez-vous qu’on puisse guérir de la perte d’une jardinière? Qu’en pensent les jardins eux-mêmes ?

Enfin, ce A, m’évoque aussi Ariane, Ari-Anne, celle qui prête le fil, celui qui permet de sortir du labyrinthe, du dédale des jours, du passsé lié au présent, de l’embrouillaminis, le fil qui permet de placer les repères, de SE situer dans l’Espace et le temps. Tant (Temps…) à dire, à exprimer, à écrire….

Souhait répété:  J’aimerais qu’on puisse lire dans les plis d’une robe, dans ses décorations, dans son travail de couture (fait par ma grand-mère ou sa couturière) comme on lit un poème ou un texte dans un livre. Il  y  a dans un tissu une émotion enclose à jamais. Et  tant de nous, femmes… et vous aussi,  fils de ces femmes…

Ciel, un cheveu dans mon thé! (la robe mémorielle 13)

Certaines m’ont demandé quand je publiais, cela semblait un peu aléatoire…C’est 3 fois par semaine, (plutôt le dimanche soir, le mercredi, le vendredi soir ou samedi matin…………..Argh…………….je suis coincée! Mais, déjà,  je déroge à la règle, aujourd’hui, nous sommes jeudi…..Je suis un peu, beaucoup, passionnément, fantaisiste! La preuve ci-dessous:

J’ai peu de rites qui me sont indispensables, peu de choses dont j’ai réellement besoin, sauf un thé, le Tarry souchong, ce  thé de chine très fumé dont je bois 1/2 litre chaque matin avant de démarrer la journée. C’est mon moment « zen », l’instant où je médite ou lis (les japonais ne disent-ils pas qu’ « un bain rafraichit le corps, une tasse de thé l’esprit. « ?) Mon surnom de grand- mère, c’est M’Anne, la contraction de « maman » et Anne, Mam’Anne; c’est devenu, si on veut bien m’en accorder le mérite: Superm’Anne  (idée de mon gendre qui, déjà avait eu l’idée d’Ana-chroniques)). J’ai écrit ces prénoms en volutes de fumée et parmi celles-ci appliquée (point de couchure) une mèche de cheveux volée à ma fille. Pendant très longtemps, on a brodé, tressé des cheveux, j’en ai dans un médaillon qui devaient être à l’arrière grand-mère de mon mari. La tasse est brodée, elle « repose » sur un ruban tissé à mes initiales.

Au  Japon (puisque j’ai déjà cité ces amateurs de thé dont la cérémonie est un art) » Si une homme n’a pas le thé en lui, il est incapable de comprendre la vérité et la beauté.  » C’est ma véri-THE , l’outil de ma créativi-THE.

Bonne journée avec un T comme tranquille,ou un thé …comme Tarry souchong!

 

Des mains encore, mais en prière

Merci à tous vos commentaires, profonds, intelligents, vous voyez juste, vous lisez et devinez entre les lignes…

La robe mémorielle 12:

Les jeux de mains (séquence 11) sont suivis de mains jointes:

« Seule la PRIERE approche de cette concision et de cette pureté qui fondent la vérité . Ecrire, c’est comme une prière: ALLER à L’ESSENTIEL« . Broder aussi, c’est une écriture; broder c’est également aller à l’essentiel! Cette citation d’Elie Wiesel ne pouvait que me tenir à coeur, me re-tenir.

Ma famille maternelle avait un ciment: la foi. Si je n’avais pas envie de semer partout des croix, j’ai aimé l’idée de représenter des mains jointes et en prière; je l’ai représentée avec des gants faits au crochet par ma grand-mère, et un chapelet ancien,  un « chapelet de rien », rouillé; sûrement pas le chapelet dont se servait mon aïeule, mais il a été trouvé dans ses affaires.    

Plus, loin, sur la robe, une médaille que ma mère portait sur elle, et la vieille épingle double rouillée…

    C’est ma grand-mère qui m’a appris le crochet; j’étais très jeune et je l’ai beaucoup pratiqué. Je pense à elle quand je crochette. Ainsi le lien court-il  à travers le temps; on n’est jamais assez redevable…Attention à ce mot: je ne parle pas du devoir comme un fardeau qui pèserait sur mes épaules, mais l‘envie, le désir poignant de dire  ma grand mère et à ma mère l’infini don de ce que j’ai reçu d’elles, celui de la vie d’abord et de tout le reste qui m’est utile pour mon propre voyage sur terre. On perd toujours le gens qu’on aime trop tôt.

Je me souviens de ces mots poignants de Camille Claudel  qui éclairent   sa vie et son oeuvre « Il y a toujours quelque chose d’absent qui me tourmente ».

« L’avenir, ce sont les éléments du passé revisité »;  j’ai brodé ces mots de Goethe sur la robe: je ne suis pas nostalgique, mais j’ai des racines pour m’ancrer, cela permet à mon arbre de grimper vers le ciel, l’espace et demain. Nous reparlerons des racines…

Jeux de mains (La robe mémorielle 11)

  « L’art est, comme la prière, une main tendue dansl’obscurité, qui veut saisir une part de grâce pour se muer en une main qui donne« . (Kafka)
 

Des doigts, deux mains forment un coeur, j’ai évidé celui- ci, j’ai cousu en appliqué-inversé un morceau d’un vieux jean de ma fille, car il me semblait qu’au fond, elle était moins présente que, par exemple ma maman dont il me restait beaucoup de souvenirs ou » reliques » et que je couvrais de dahlias.

Ce dessin (trouvé je ne sais plus où sur la Toile qui porte bien son nom!) est brodé au point de tige, il couvre le dos du corsage. J’ai brodé ensuite le coeur en jean lui-même, mumurant  en confidence, que l’amour parfois s’exprime maladroitement, mais il est là, il suffit de le faire sourdre comme l’eau jaillissante et essentielle. D’ailleurs, c’est le coeur qui guide la main, cette broderie est l’illustration de ce que nous ne devrions cesser d’oublier.

Cette 2° photo, prise de trop près, n’est guère lisible; c’est tant mieux, c’est un message d’amour entre ma fille qui s’en va 6 mois très loin de moi, et très loin même de la France et de ses racines familiales… 

La jupe a du « fond » , vaste surface à couvrir de texte, donc, à bientôt pour la suite de cette aventure textile…

NB:.Dans l’article précédent( la robe mémorielle 10) je parlais de « nier la mort », donc d’arrêter le temps, je vous propose cette citation: »Aujourd’hui, broder, c’est s’offrir le luxe du temps, gagné sur les transports, dérobé à la vie familiale, récupéré sur la télévision, détourné d’autres activités. La broderie requiert de la lenteur, un déroulement qui ne peut s’accélérer ou se compresser comme l’impose notre époque.  Chaque petit point est une fraction d’éternité. Offrir une broderie que l’on a faite de ses mains, c’est donner un peu de soi, mais aussi quelque chose de totalement immatériel et d’infiniment précieux : son temps ». (broderiepassion.free.fr)

L’article précédent, pour des raisons techniques trop longues à expliquer, se retrouve au 26 janvier(pour celles qui voudraient lire les commentaires ou leurs réponses)